Tout
mon corps tremblait et, chancelante, je trébuchai, une main crispée sur mon
estomac, l’autre sur un genou, comme pour essayer de me redresser. Mes griffes
se plantèrent profondément dans la chair mais la douleur ne me fit pas oublier
la sensation de famine qui me lacérait les entrailles.
Affamée,
je n’avais qu’une envie : crever, crever une bonne fois pour toute pour ne
plus souffrir.
Je
me laissai glisser le long du mur de briques, je me recroquevillai dans la
pénombre de la ruelle. Les lueurs crépusculaires, chatoyantes, se reflétaient sur
les parois sans parvenir à réchauffer mon âme. Un feulement poussif assécha ma
gorge, et il me tardait que la touffeur de l’été disparût. Au moins, en hiver,
les clochards de mon espèce se faisaient plus rares : ils agonisaient sous
les ponts et moi, sous ma forme animale, je pouvais me payer les restes. Ma
fourrure, si miteuse fût-elle, savait me tenir chaud et les ténèbres
quasi-constantes n’incommodaient en rien ma vision féline.
Oui,
me tardait l’hiver et son éternelle obscurité. Si je survivais jusque-là.
Et
rien n’était moins sûr.
Car
l’harassante canicule des jours sans fin desséchait puits et carcasses, calcinait
les récoltes, pourrissait les vivres. Les rares pluies, acides, brûlaient la
peau et achevaient le bétail.
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